Pollux était en concert à La Vapeur à Dijon le vendredi 25 janvier, en première partie de PLK. L’occasion pour nous d'aller à sa rencontre pour lui poser quelques questions sur lui, sa musique et ses projets.
La Loge : Pour commencer, on voudrait te parler de ta productivité l’année dernière, car tu as quand même dévoilé trois projets ! Comment tu peux expliquer cette productivité ?
Pollux : J’avais envie de faire du son, et comme je suis assez nouveau dans l’univers musical je me suis dit que c’était important de donner beaucoup pour que les gens essaient de capter mon univers, d’autant plus que je fais pas mal de morceaux dans beaucoup de délires différents. L’idée c’était vraiment de marquer le coup en proposant plein de choses différentes et en essayant de faire comprendre au public ou aux personnes qui me découvrent que j’ai plein de facettes et de leur faire capter mon univers. C’est vrai qu’il y a eu trois projets cette année et c’est assez marrant parce que le premier, Éocène, sorti en début d’année, était effectivement prévu mais les deux autres projets n’étaient pas prévus. C’est vraiment à force d’aller au studio, à force d’aller en concert, de rencontrer des gens qui me réclamaient de la musique. Brahmā c’était sur un coup de tête, A Mun Klwa encore plus sur un coup de tête. Donc je me suis dit pourquoi pas, je ne me vois pas sortir les sons individuellement alors autant les compacter et en faire un truc cool.
LL : Tu penses que cette productivité va continuer ?
P : Nan nan nan, je vais me reposer, entre guillemets. En vrai, pas vraiment, le prochain projet est prévu, si tout se passe bien, pour la fin d’année. J’ai vraiment envie de prendre du temps pour le bosser parce qu’il y a encore beaucoup de choses que j’ai envie de tester, il y a beaucoup d’univers dans lesquels je ne suis pas encore allé. Je veux vraiment que le prochain projet soit quelque chose de carré de A à Z, et surtout tout anticiper, que tout soit prévu à l’avance. Donc je risque d’être légèrement plus sage cette année mais il y aura du visuel, il y aura des sons qui vont sortir et pas mal de feats aussi. Je vais me mélanger un petit peu plus que l’année précédente.
LL : Avant ces trois projets tu en avais sorti deux autres en collaboration avec Lord Esperanza. C’est un duo qui est fini ou il peut reprendre ?
P : La relation n’a pas bougé, au contraire même, plus les années passent plus on s’aime, c’est vraiment la famille. Donc il n’est pas impossible que ça reprenne. Pas cette année ni l’année prochaine je pense, parce que lui a son parcours et moi je suis en train de me construire de mon côté. Il est légèrement plus avancé que moi ça c’est sûr, donc moi aussi je dois faire mon truc et être bien identifiable en tant que Pollux. Mais ce n’est absolument pas impossible que ça se refasse et ce qui est sûr et certain c’est que cette année, il y a 80% de chance pour qu’il y ait un morceau en commun qui sorte.
LL : Justement, est ce que tu vas modifier l’écriture ou la façon de faire un morceau quand tu sais qu’il est en feat ?
P : Pas forcément. En fait, je vois les feats comme une double dose de fromage. Pour moi, c’est puiser dans la force de chacun pour essayer de faire encore mieux que quand tu es tout seul. Ce qui change dans la conception du morceau c’est qu’il va y avoir de l’échange avec la personne avec qui je suis en feat. On va choisir la prod ensemble, on va construire le morceau ensemble, parfois il y a des avis qui concordent totalement et c’est top, parfois il y a des divergences. Donc le truc qui change par rapport à quand tu es tout seul, c’est qu’il n'y a pas que ton avis. Moi je suis dans une démarche où le feat ne doit pas être un morceau où à la fin tu te dis « c’est lui plus lui », pour moi ça doit être « lui et lui ». Il doit vraiment y avoir une symbiose. Donc il n’y a pas vraiment de différences si ce n’est l’échange.
LL : On vient de te voir sur scène là, c’est vraiment un truc que tu aimes, que tu essaies de développer ou tu préfères être en studio ?
P : Honnêtement ce serait difficile de faire un choix entre les deux. C’est vrai que c’est deux kiffs différents. La scène c’est quelque chose que je kiffe parce qu'il y a du contact, il y a le public qui t’écoute, qui vient te découvrir. C’est une autre manière de présenter ta musique. C’est totalement différent, je trouve, de découvrir un artiste sur scène que de le découvrir chez soi à deux ou trois heures du mat. Donc pour moi la scène c’est primordial de ouf parce qu’il y a de l’échange, ça vit, c’est un petit peu la cerise sur la musique. Après le studio j’adore aussi, je ne suis pas scientifique du truc, mais en tout cas j’aime concocter le truc. Je trouve que c’est complémentaire. Tu es au studio, tu crées ton truc ; et la scène c’est une manière de mettre en avant ce que tu as créé. Donc pour moi c’est la suite logique du truc.
LL : Dijon c’est une grosse date pour toi ?
P : C’est ma plus grosse date. Avant les plus grosses salles que j’avais fait c’était le Trabendo avec 800 personnes, et j’avais fait la Gaîté lyrique en première partie de Lord avec Youri, pareil on était à 700. Et c’est vrai que là par contre, 1200 places ça fait du monde. Mais ça fait grave plaisir, le public est réceptif de dingue. Sachant que je suis très peu connu par ici, je pense, c’est d’autant plus plaisant d’arriver face à un public qui ne te connaît pas mais qui reçoit le truc et qui vit le truc.
LL : Je voulais aussi te parler du morceau « Fantôme » dans lequel tu abordes pas mal de choses. Comment te sont venus les différents thèmes ?
P : Je ne calcule jamais le thème de mes morceaux à l’avance. Je ne me suis jamais dit que j’allais gratter sur un truc précis. Donc c’est 99% du temps l’instru qui m’amène à ce que je raconte dessus. Mais pour répondre plus précisément, c’est vrai que dans ce morceau je décris un coté assez obscure de la société, assez noir. Mais c’est ce que je vois, c’est tout simplement ça. Ce que je fais dans ma musique, du moins ce que j’essaie de faire, c’est retranscrire ce qui m’a inspiré, ce que j’ai vu. Soit c’est quelque chose qui m’est arrivé et je le transmets, soit c’est quelque chose que je constate et je le traduis à ma manière. Je n’anticipe jamais mes sujets. Mais ça me tient à cœur, dans le sens où ça ne concerne pas que moi, c’est à dire que le gars qui va dormir dans la rue, qui ne va pas avoir de case, qui va être en galère de thune, tout le monde le voit, donc je ne pense pas être la seule personne à le constater. Après, moi je fais de la musique, j’écris, donc c’est ça qui me parle. Mais la démarche à la base ce n’est pas de dénoncer quelque chose ou de me considérer en défenseur de quelque chose, c’est vraiment personnel et effectivement ça reflète ce qui se passe.
LL : Justement tes morceaux sont assez sombres, assez obscures. C’est comme ça que tu vois la réalité ?
P : Dans « Ombres » qui est dans Éocène, je dis : « je suis pas malheureux, je suis juste réaliste ». C’est vrai que très souvent les gens, même mes potos, me disent « Ouais t’es bresson là, tu vas bien ? ». Mais c’est vrai que je n’ai pas l’impression de voir les choses de manière négative, j’ai vraiment l’impression de voir les choses de manière réaliste ; et quand il se passe quelque chose de bien je vais le dire, je ne vais pas être dans un schéma où tout est noir, rien ne va, il n’y a plus d’espoir… Pas du tout. C’est simplement qu’il y a des moments, et c’est vrai que ça arrive souvent, où effectivement il y a des choses qui vont rester, qui vont me marquer plus que d’autres choses, et du coup je vais plus m’axer sur ça. Mais je pense aussi que très souvent, on voit plus le mal que le bien, on retient beaucoup plus le mal que le bien. A partir de là je pense que ça me touche aussi, ça agit sur moi. Mais la force du truc c’est justement d’en être conscient, de le dire comme moi je le dis, et d’agir à coté pour faire en sorte que ce ne soit pas mauvais. Pour moi le négatif ce n’est pas une fin en soit, absolument pas.
LL : Tu as des projets hors musique ?
P : Oui. Après je t’avoue que c’est quelque chose de très embryonnaire pour l’instant, donc c’est difficile pour moi de donner beaucoup de détails. Du moins, ce serait un truc plus "entité" où je ne serais pas relié au truc, mais qui pourrait regrouper un certain nombre d’acteurs : musique, arts, etc. Je le développe petit à petit, je vois un peu les choses en grand alors forcément ça prend plus de temps, mais effectivement c’est prévu et si tout se passe bien ça se mettra en place, pas cette année, mais l’année prochaine, ou peut-être le synchroniser avec la sortie du projet si j’y arrive.